jeudi 7 mars 2013

121e jour - 6 mars - Le patient tissage de la toile se continue

Elle est longue, la liste des personnes qu'Imperial Tobacco Canada (ITCL), JTI-Macdonald (JTI-Mac) et Rothmans, Benson & Hedges (RBH) envisagent d'appeler à la barre des témoins de faits, et la partie défenderesse a le droit de l'allonger. On y trouve notamment une vingtaine de personnes jadis au service du gouvernement fédéral canadien, comme responsables politiques, cadres dans la fonction publique ou conseillers scientifiques.

Par contre, rendu où est le procès, les avocats des trois cigarettiers du marché québécois doivent obtenir la permission du juge pour ajouter à leur future preuve en défense des témoignages d'experts.

La défense des compagnies de tabac pense avoir besoin de produire des expertises, non annoncées avant l'automne dernier, au sujet de la connaissance du public de la nature des méfaits du tabac ainsi qu'au sujet du contenu utile des mises en garde sanitaires sur les paquets de cigarettes. Vraisemblablement trois expertises additionnelles au total.

Devant le juge Brian Riordan mercredi, Suzanne Côté (ITCL), Simon Potter (RBH) et François Grondin (JTI-Mac) ont plaidé la légalité et la nécessité de cet ajout à la preuve en défense. Un quatrième avocat, André Lespérance, a servi la réplique des recours collectifs.


Peaufinage du dossier

Entre temps, la partie demanderesse au procès continue la finition de sa preuve. Une partie du travail consiste à faire verser au dossier de la preuve des documents nouvellement obtenus, puisqu'il en arrive encore.

Dans d'autres cas, les documents font déjà partie du dossier depuis des mois, mais en vertu du jugement du 2 mai dernier de l'honorable Brian Riordan au sujet des documents orphelins, lequel jugement pourrait un jour être invalidé par un tribunal supérieur, on ne sait jamais.

Lorsque les avocats des recours collectifs ont à leur disposition un témoin qui peut venir dire qu'il a déjà lu ou vu ou reçu un document, voire y reconnaître une annotation, la mention 2-M (pour jugement du 2 mai) est enlevée, comme on enlève un petit drapeau dans une liste de courriels, et le document est dans la preuve, comme une pincée de sable fin dans du béton liquide qu'on va bientôt couler et faire sécher.

Mercredi, c'est l'ancien vice-président au marketing d'ITCL, le souriant Anthony Kalhok, qui est revenu devant le tribunal pour aider brièvement Me Gabrielle Gagné et Me André Lespérance dans cette tâche.  (Le travail concernait notamment les pièces 1026, 1029, 1035, 1039, 1044,  1045, 1051, 1056, 1063, 1065, 1073 et 1074.)

L'as du marketing a été brièvement contre-interrogé par Me Craig Lockwood d'ITCL. L'avocat espérait vraisemblablement minimiser l'importance des pièces examinées, en particulier une provenant d'un bureau de consultant en études de marché. Le témoin Kalhok a au contraire confirmé que le document avait une grande valeur pour les marketeurs de la compagnie à l'époque. Les avocats des recours collectifs se retenaient de pouffer de rire. Me Lockwood a gardé son sang-froid mais abrégé le contre-interrogatoire. De toutes manières, Tony Kalhok fait partie des témoins que la défense de l'industrie a annoncé vouloir rappeler à la barre. Encore que l'incident pourrait mener à une reconsidération de la pertinence d'un tel retour.
Le juge, qui n'avait pas oublié l'un des passe-temps de M. Kalhok que sa comparution en avril 2012 avait accidentellement révélé, a souhaité au témoin beaucoup de plaisir au curling.

Sur les marches du palais de justice de Montréal hier midi, le temps doux, pas encore printanier mais presque, avait multiplié les groupes de fumeurs. À la cafétéria, on croisait des agents de sécurité venus escorter devant un tribunal des prévenus logés dans une prison provinciale du district judiciaire. Une journée ordinaire dans un palais de justice. Le méga-procès historique du tabac échappe à l'attention des foules. Très peu de personnes sans toge hantent la salle d'audience 17.09 et aucune nouvelle tête.

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Me Gagné a soumis au tribunal une chronologie des parts de marché des trois (jadis quatre) principaux cigarettiers canadiens, une chronologie qu'elle a rédigée sur la base de plusieurs documents. La période couverte va de 1956 à 1998. (pièce 1437).

Me Lockwood (ITCL) a fait valoir que les parts de marché calculées faisaient référence au Canada et non au Québec. Me Potter (RBH) a énuméré ses craintes méthodologiques. Le juge Riordan a dit qu'il appréciait la contribution de Me Gagné et que les cigarettiers avaient le droit et intérêt à fournir une chronologie qu'ils trouveraient meilleure.

Une dizaine d'autres documents ont été versés au dossier de la preuve et concernent le marketing de RBH (pièces 1439 à 1447).

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Pour accéder aux jugements, aux pièces au dossier de la preuve ou à d'autres documents relatifs au procès contre les trois principaux cigarettiers canadiens, IL FAUT commencer par

1) aller sur le site des avocats des recours collectifs https://tobacco.asp.visard.ca/main.htm


2) puis cliquer sur la barre bleue Accès direct à l'information

3) puis revenir dans le blogue et cliquer sur les hyperliens au besoin,
ou
utiliser le moteur de recherche sur place, lequel permet d'entrer un mot-clef ou un nombre-clef et d'aboutir à un document ou à une sélection de documents.