mercredi 17 octobre 2012

70e jour - 16 octobre - Contentez-vous de répondre aux questions, M. Broen. (juge Riordan)


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Peut-être parce que le juge Riordan avait fait preuve d'une grande indulgence avec lui lundi, jusqu'à faire mine, avec un sourire qui n'était pas condescendant, de trouver les questions difficiles en même temps que le témoin, ce témoin, John Broen, s'est cru autorisé hier (mardi) à commenter le style des questions du procureur Johnston, et à se laisser aller plutôt souvent à passer des commentaires sur le déroulement de l'interrogatoire avant de répondre aux questions, qu'il a fallu souvent lui répéter.

Au point où la deuxième journée de témoignage s'est terminée sans que l'interrogatoire le soit tout à fait, mais juste à temps pour que le témoin Broen ne fasse pas l'unanimité contre lui. Dans l'après-midi, il y a eu un moment où Me Bruce Johnston a remercié, sans ironie, Me Simon Potter pour une de ses objections. Le juge a alors dit, avec amusement, « objection maintained » (objection retenue).  Et Me Potter, qu'on n'a jamais vu en panne de réparties et d'amabilités dans pareilles situations, n'a pas donné l'impression de se rendre compte de la situation, paraissant plutôt absorbé dans ses dossiers et ses soucis.

À trois moments durant la journée, le juge Riordan a rappelé le témoin à l'ordre.


Les marques de RBH ne « pognaient » pas chez les jeunes

À l'occasion du témoignage de John Broen, le procureur des recours collectifs Bruce Johnston a fait verser comme pièces au dossier de la preuve quatre études de la prévalence du tabagisme au Canada (pièces 763-0677763-1277, 763-0678 et 763-0179) dont la première date de juin 1977, alors que M. Broen était président de Benson & Hedges (et il le fut de la fin de 1976 jusqu'en mai 1978).

À partir d'un sous-échantillon de « 2516 fumeurs de cigarettes adultes de 15 ans et plus » (« based on 2516 adult (aged 15 years and over) cigarette smokers »), ces rapports permettaient de voir quelle était la popularité relative des différentes marques de cigarettes auprès des personnes mineures. On peut notamment constater que des marques de RJR-Macdonald et d'Imperial Tobacco sont en tête du palmarès tabagique chez les adolescents et les jeunes adultes (15-24 ans), alors que les marques des compagnies Benson & Hedges et Rothmans ramassent les restants.

extrait d'un des rapports
commandés par Benson & Hedges
(pièce 763-0677)
Grosso modo, John Broen a expliqué que B & H utilisait un sondage omnibus auprès d'une population de 15 ans et plus, parce qu'elle n'avait pas les moyens d'acheter un sondage auprès des seules personnes majeures.

Les sondages omnibus ont le dos large. Après avoir entendu des témoins d'Imperial et de RJR-Mac patiner sur le même sujet, une question vient à l'esprit : pourquoi et pour quels clients les firmes commerciales de sondage posaient des questions à des garçons et filles de 15 ans au sujet de leur marques préférées de cigarettes, si aucun cigarettier ne s'intéressait à ce genre de réponses ? Qui cela pouvait intéresser davantage et intéresser tout court ?

Parmi les moyens pris par RBH pour contrer l'impopularité relative de ses marques, il y a eu vers le milieu des années 1980 une mise en marché de paquets de 15 cigarettes (à un prix inférieur aux paquets de 20 ou 25), une pratique où RBH n'était cependant pas la première à s'aventurer. (pièce 765)


La voix des maîtres

Depuis l'automne 2008, c'est Philip Morris International, le numéro 1 mondial de la cigarette, qui contrôle et possède totalement Rothmans, Benson & Hedges (RBH).

En 1992 et en 1993, à une époque où John Broen était le vice-président aux affaires corporatives de RBH, la compagnie était contrôlée et possédée par Rothmans International de Londres et par Philip Morris de New York. Les deux multinationales ne se privaient pas de transmettre leurs directives à la compagnie canadienne, concernant notamment la position à tenir en matière de méfaits sanitaires du tabagisme (pièce 768 Rothmans International et pièce 777 Philip Morris). Il est révélateur de constater qu'aussi tard qu'en 1993, Rothmans International affirmait qu' « il n'a pas été scientifiquement prouvé que le tabagisme cause la maladie ».

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Aujourd'hui (mercredi), le tribunal de Brian Riordan entend le témoignage du Norm Cohen, qui a travaillé comme chimiste chez RBH. L'interrogatoire est mené par Me Pierre Boivin.


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Pour accéder aux jugements, aux pièces au dossier de la preuve ou à d'autres documents relatifs au procès contre les trois grands cigarettiers, il faut commencer par

1) aller sur le site des avocats des recours collectifs https://tobacco.asp.visard.ca/main.htm puis cliquer sur la barre bleue Accès direct à l'information, puis
2) revenir dans le blogue et cliquer sur les hyperliens,

ou utiliser le moteur de recherche sur place, lequel permet d'entrer un mot-clef ou un nombre-clef et d'aboutir à un document ou à une sélection de documents.